Bonjour Gaël, c’est officiel, les JO 2020 de Tokyo sont reportés au plus tard en 2021.
Avec le COVID19, ton projet 2020 devient 2021.
Tes investissements et tes sacrifices ne porteront pas leurs fruits cette année… comme nous tous.
C’est la première fois que sur toute la Planète, un évènement nous rassemble, à la fois Universel et Individuel. Tous touchés, tous impactés, tous au ralenti avec des degrés différents.
Ce n’est pas une blessure qui te prive de l’arène, c’est un virus. C’est une pandémie.
Merci de partager avec nous ce que pense, se dit et fait un sportif de haut niveau.
Tellement loin de nous, et si près cependant, privé d’activité, d’horizon et de liberté …
Interview de Gaël QUERIN :
- Alors Gaël, comment vas-tu, toi et les tiens, dans cette configuration exceptionnelle après plus de 5 semaines de confinement ?
Bonjour, je vais bien, ainsi que les miens. Papa d’un 3ème enfant depuis fin février, je couve au mieux mon petit bout pendant cette période de confinement.
- Comment le vis-tu concrètement, as-tu une dérogation pour t’entraîner ?
Je le vis mieux maintenant, j’ai eu du mal à encaisser le fait de ne plus aller au stade et de ne plus pouvoir m’entrainer quotidiennement. Surtout qu’au début, le CIO n’avait pas l’intention de décaler les Jeux Olympiques : J’ai vu, dans un premier temps, tous mes efforts réduits à néant et devoir rester coincé à la maison. Aujourd’hui, tout va bien : toutes les échéances internationales ont été reportées à l’année prochaine. Je le vis donc comme une trêve, et je repars dans une planification comme une rentrée d’après vacances. Malheureusement, je n’ai pas eu de dérogation pour m’entrainer mais j’y arrive correctement depuis mon jardin, et dans ma cave ! Dans cette nouvelle configuration, je trouve des idées d’exercices, d’étirements, d’assouplissements. C’est le moment d’être créatif et de revenir aussi aux fondamentaux. Ça me permet de garder la tête froide, tournée vers mon objectif.
- Rester chez soi, qu’est-ce que cela signifie pour un sportif de haut niveau ?
C’est comme être en cage. Et être obligé de canaliser le surplus d’énergie pour ne pas rendre fou toute la maison. J’ai l’habitude et le besoin d’espace, sans oublier de rythme, de fractionnement des exercices, de vitesse. Ma vie est une succession de mouvements précis et répétés, de routine même, et ça me donne des repères et de la satisfaction. Un sportif de haut niveau sans entraînement régulier, sans rendez-vous avec la compétition, sans repère en termes de performance et de défi peut glisser très facilement dans le faire pour faire et non dans le faire pour réussir.
- Comprends-tu ces mesures de confinement ? Que te dis-tu pour ne pas sortir et maintenir ta condition physique (qui était au top il y a quelques semaines) ?
Oui, je comprends bien sûr ces mesures de confinement ! C’est dans l’intérêt de tous d’être en bonne santé, sain et sauf. Moi-même asthmatique, je n’aimerai pas être confronté à cette maladie. Donc la rigueur du confinement est bien menée chez moi : entrainement dans le jardin, dans la cave ou sur le parking devant la maison, et c’est tout. C’est bien assez pour moi pour continuer à m’entretenir et essayer de garder un niveau de forme correct, pour ne pas être trop à la peine lors de la reprise. Il s’agit plus de ne pas trop perdre le fruit des efforts accomplis, plutôt que de vouloir gagner en forme. Je suis en mode conservation des acquis dans la mesure du possible. Ce challenge est déjà très élevé.
- Tu as de jeunes enfants, que leur expliques-tu en tant que parent sur la situation, ta présence à la maison ?
Les enfants ont clairement compris ce qui se passe dans le monde aujourd’hui, et c’est même eux qui me coachentlorsque je pars faire les courses. Le fait d’être à la maison c’est un régal pour eux et pour moi car ils s’amusent, et moi, j’essaye d’en faire les futurs sportifs de haut niveau de demain. Entre jeux et pédagogie, nous traversons ensemble, comme tout le monde, une séquence de vie inédite. J’ai transformé cette frustration sportive en opportunité de partage familial. Nous étions déjà très soudés, et avec l’arrivée du petit dernier, nous accélérons son intégration.
- Ces consignes ne sont-elles pas une invitation à faire équipe, à la coopération alors que beaucoup seraient plus en mode sport individuel, voire en compétition (au regard des sorties intempestives et de la guerre des masques) ?
J’en ai eu une brève expérience, sur la deuxième semaine du confinement je m’étais complètement renfermé, sans contact avec les amis, à ruminer dans mon coin et faisant mes séances dans la cave, borné mais sans vrai objectif. Ça a été pour moi la pire semaine du confinement car je me suis coupé de tout, de tous : une forme d’individualisme. Ça a eu des répercussions sur mon humeur et mon état à la maison : Je n’avais plus goût à rien, j’étais limite en dépression. Je m’en suis rendu compte et surtout de l’impact sur les miens, alors je me suis mis trois claques pour me réveiller et sortir de cette mauvaise passe. Tout allait mieux pour tout le monde, on jouait et communiquait à nouveau ensemble. Oui, l’individualisme ne peut être qu’un frein alors qu’on cherche à aller de l’avant dans cette pandémie. La ressource, c’est les autres, et de prendre soin d’eux. Un cercle vertueux…
- Chez METISSE, depuis le premier jour et tous les jours, on se pose deux questions, peux-tu y répondre aujourd’hui.
Le Covid19 m’apprend à m’adapter afin de m’entrainer autrement au quotidien.
Et j’ai besoin de …canaliser encore cette énergie.
- Quelles seront ta première décision et ta première action quand, comme nous tous, tu retrouveras toute ta latitude de liberté ?
Ma première décision sera d’aller rendre visite à ma famille, et de profiter d’un bon repas ensemble, les enfants trépignent d’impatience de retrouver leurs grands-parents et pourquoi pas un barbecue de déconfinement avec tous les proches ? Mais aussi de repartir faire ce j’aime et qui m’aura manqué : courir à perte de vue jusqu’à épuisement peut-être …Peut-être courir autrement, en profitant, en appréciant ce qui était si naturel hier et qui ne l’était plus pendant deux mois.
- Veux-tu partager une idée, une réflexion ?
Ma réflexion : depuis 5-6 semaines, nous sommes confinés. Tous les magasins, restos et tout autre moyen de consommation étant fermés, je me rends compte que tout cela n’est pas si nécessaire en soi, et je m’en rends compte surtout quand je regarde mon portefeuille ! Ces deux mois de confinement font réfléchir ! Nous allons ressortir grandit et bien plus fort de tout ça.
Encore Merci Gaël, et prends soin de toi et des tiens.
Claude & Pascal